Vous me connaissez à présent assez pour savoir que j’aime parler de mes lectures, mais aussi, d’adaptations sur scène de romans. Je m’éloigne un peu – mais pas trop – des sentiers battus par la littérature en évoquant le spectacle que j’ai vu pendant le Festival OFF d’Avignon sur Marie des Poules, la gouvernante de George Sand

Il m’aura fallu attendre le OFF 2022 pour découvrir Marie des poules de Gérard Savoisien, pour lequel Béatrice Agenin, ancienne sociétaire de la Comédie Française (qui tient ici le rôle titre) avait reçu le Molière de la Comédienne en 2020. Et quelle incroyable découverte !
J’ai en face de moi un plateau presque nu, composé d’une table de café et d’une gigantesque maison de poupée qui, au fil de la pièce, verra ses pièces s’ouvrir pour illustrer un propos, un dessein.
À 11 ans, la petite Marie Caillaud entre au service de George Sand. Elle héritera du surnom « Marie des Poules », en tant que préposée au poulailler, et ce, pour être différenciée de Marie la cuisinière. Cette petite fille intrigue tout de suite George Sand, qui la prend rapidement sous son aile. Elle se mettra en tête de lui apprendre à lire et à écrire, mais aussi, de lui faire jouer, devant ses illustres amis – parmi lesquels Eugène Delacroix et Alexandre Dumas – les pièces qu’elle a écrites. Marie des Poules se révélera très douée pour l’art dramatique, et aussi, pour apprendre, progresser, gommer cet accent berrichon qui l’a dessert, parfois. Elle apprendra aussi, pour son plus grand bonheur et son plus grand malheur, les choses de l’amour : Maurice, le fils de George Sand (Arnaud Denis, qui signe aussi la mise en scène), coureur, séducteur, calculateur, convaincu que le monde féminin entier est à ses pieds, ne tardera pas à la séduire. Manipulateur aussi – les marionnettes et les poupées dont ils tirent les ficelles pendant la pièce ne pourront dire le contraire.
Béatrice Agenin incarne Marie des Poules et George Sand, deux personnages qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre, avec un talent égalé. L’une est douce, terriblement émouvante, l’autre est une femme de poigne, pas du genre à s’en laisser conter. Les deux partagent une soif de liberté et un grand cœur. Arnaud Denis campe, quant à lui, un Maurice tout en nuances. Au départ, odieux à souhait, son cœur s’ouvre peu à peu devant cette Marie qui l’étonne sans cesse, à qui il a envie de tout confier, qu’il aime entendre déclamer des textes ou formuler des réflexions, pleines de bon sens, sur l’existence.
Cette pièce m’a autant émue et passionnée. Pour la « petite histoire », la liaison entre Maurice et Marie des Poules a été découverte récemment, et Gérard Savoisin a eu l’excellente idée de s’en emparer.
Cette chronique est également paru sur le Blog Baz’art