« Ceux que je suis » d’Olivier Dorchamps : que je suis sous le charme !

Tombée amoureuse des Éditions Finitude depuis qu’elles ont découvert Olivier Bourdeaut et son En attendant Bojangles, je suis de près leurs publications. Grâce à un partenariat avec l’agence La Bande, j’ai pu lire l’une de leurs toutes dernières, Ceux que je suis d’Olivier Dorchamps (encore un Olivier !) et le charme a opéré…

L’histoire que nous raconte Marwan commence par un drame, celui de la mort de son père Tarek, garagiste star de la rue de Paris, à Clichy. À 64 ans. Le destin en a voulu ainsi.

Marwan est un Français d’origine marocaine. Il est un professeur d’histoire/géographie qui s’apprête à faire sa première rentrée avec des Terminales. Il est le frère jumeau d’Ali, brillant jeune avocat, et de Foued. Il est l’ex-petit-copain de Capucine avec qui plus de choses les séparent que les rapprochent. Il est le fils de Khadija et de Tarek, deux immigrés de Casablanca venus chercher en France ce qu’elle avait de plus beau à offrir : une chance pour leurs enfants. Il est celui à qui les parents ont offert la liberté de croire, de prier. Il est ce jeune homme désemparé devant le drame de la nouvelle – son père mort, cela n’a aucun sens -, et devant cette incompréhension : Tarek a souhaité être enterré au Maroc et c’est à lui d’accompagner son cercueil en avion. Le reste de sa famille le rejoindra de son coté, en voiture, comme le veut la tradition.

Accompagné de Kabic, le meilleur ami de feu son grand-père, Marwan embarque pour Casablanca sans se douter que ce n’est pas un hasard si c’est lui qui a été choisi. Et qu’en retrouvant sa grand-mère, Mi Lalla, il rencontrera tous ceux qu’étaient son père, en plongeant dans un passé dont il ne lui parlait jamais, dans des secrets qu’il voulait que ses fils, un jour peut-être, découvrent par eux-mêmes…

Et comme souvent avec les secrets, on l’a enveloppé dans plusieurs couches de honte, et des vies entières, jusqu’à la mienne, en ont été tapissées.

Ceux que je suis est un très beau roman sur l’identité, sur sa multiplicité intrinsèque. Sur les clichés, les étiquettes qui nous grattent jusqu’à nous irriter la peau. Sur le mystère, la pudeur des origines. Sur la volonté de protéger ceux qu’on aime par le secret.

La sincérité de ce premier livre de l’auteur franco-britannique Olivier Dorchamps – lui-même issu d’une famille cosmopolite et donc certainement très imprégné par ces questions – m’a touchée en plein cœur.

Son humour, aussi, qui n’est jamais très loin de l’émotion. Nombreuses, si nombreuses sont les phrases que j’ai soulignées, tellement elles me parlaient, m’enchantaient, me faisaient rire.

– […] Tu veux une coupe ?

– Non, je ne bois pas.

– Ah oui, pardon. En même temps, le champagne, c’est pas vraiment de l’alcool. Vous devriez y avoir droit. Je plaisante. […] Chacun fait ce qu’il veut et c’est très bien de suivre ce que dit le Coran.

– Je ne bois pas parce que je conduis…

Il m’a emportée dans un Maroc qui m’est inconnu, dans le quartier populaire et si accueillant d’Hay Hassini, il m’a donnée la chance de plonger dans les destins de gens extraodinaires comme Mi Lalla, de Tarek, de Kabic et de Marwan. Dans les rêves de Californie de deux gamins de Sidi Moumen et dans leurs sacrifices.

Et de comprendre que ce que nous sommes est le fruit de milliers de petites histoires éclatées, de milliards d’événements qui nous ont précédé ou qui nous sont arrivés. Que nous sommes ceux que nous sommes et qu’il en faut, du temps et du recul, pour les découvrir tous.

Je remercie en silence mon père de m’avoir fait venir jusqu’ici pour comprendre qui je suis. Non pas comprendre. Apprendre.

Et moi, je vous remercie, monsieur Dorchamps, pour ce merveilleux moment de lecture.